Cass. com. 03 juillet 2024, n° 23-15.715
Droit des Affaires | Procédures collectives | Admission de créance | Redressement judiciaire | Liquidation judiciaire
L'article L. 622-6, alinéa 2 du Code de commerce dispose : "Le débiteur remet à l'administrateur et au mandataire judiciaire, pour les besoins de l'exercice de leur mandat, la liste de ses créanciers, du montant de ses dettes et des principaux contrats en cours. Il les informe des instances en cours auxquelles il est partie".
L'omission du créancier par le débiteur sur la liste prévue à l'article L. 622-6 précité permet à ce créancier d'être de plein droit relevé de la forclusion par le juge-commissaire, sans que le débiteur ne puisse s’y opposer en invoquant le fait qu’il conteste la créance.
Dans l’espèce rapportée, le créancier qui n’avait pas procédé à la déclaration de sa créance dans le délai de deux mois, avait sollicité du juge-commissaire d’être relevé de forclusion. Devant le refus de ce dernier, le créancier avait formé opposition à l’ordonnance du juge-commissaire et avait obtenu gain de cause.
C’est dans ce contexte que le débiteur fait grief à l’arrêt de relever le créancier de forclusion au motif "que les créanciers, qui n'ont pas déclaré leurs créances dans les délais prévus à l'article L. 622-24 du Code de commerce, ne peuvent être relevés de leur forclusion que s'ils établissent que leur défaillance n'est pas due à leur fait ou qu'elle est due à une omission du débiteur lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6 du Code de commerce ; que le débiteur ne commet pas une omission lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6 du Code de commerce, lorsqu'il ne mentionne pas, dans cette liste, le nom d'une personne, dont il conteste être le débiteur d'une quelconque créance, peu important qu'un jugement ait retenu que cette personne détient une créance à l'égard du débiteur, dès lors que celui-ci a interjeté appel de ce jugement".
Dans sa décision, la Cour de la cassation répond tout d’abord qu’il résulte de "l'article L. 622-24 du Code de commerce que la créance portée par le débiteur […] à la connaissance du Mandataire judiciaire […], si elle fait présumer la déclaration de sa créance par son titulaire, dans la limite du contenu de l'information donnée au Mandataire judiciaire, ne vaut pas reconnaissance par le débiteur du bien-fondé de cette créance, de sorte qu'il peut ultérieurement la contester".
Il résulte de cette première affirmation que le fait, pour le débiteur de porter une créance à la connaisse du Mandataire judiciaire n’a ni pour objet, ni pour effet d’en admettre le bien-fondé, de sorte que reste ouverte, pour le débiteur, la faculté de contester ladite créance.
La Cour de cassation précise encore, dans sa décision, que "selon l'article L. 622-26 du Code de commerce, l'omission du créancier par le débiteur sur la liste prévue à l'article L. 622-6 précité permet à ce créancier d'être de plein droit relevé de la forclusion par le juge-commissaire".
C’est au visa de l’article précité que la Cour de cassation rejette le pourvoi du de la Société débitrice au motif que la demande de relevé de forclusion du créancier doit être accueillie, la Société débitrice "ne pouvant valablement soutenir qu'elle n'avait pas à la mentionner sur la liste de ses créanciers au motif qu'il ne peut lui être imposé de déclarer pour le compte d'un créancier une créance dont elle conteste l'existence".
Ce qu’il faut retenir de cette décision, c’est que l’omission d’un créancier par le débiteur sur la liste qu’il remet au Mandataire judiciaire permet à ce créancier d’être relevé de la forclusion de plein droit par le juge-commissaire.
Par Maître Cédric MIGNARD