Cass. com. 12 juillet 2023, n° 22-11.321
Droit des affaires | Droit bancaire | Caution
On ne peut que constater le recours de plus en plus fréquent au devoir de mise en garde par les emprunteurs en vue d’obtenir des dommages-intérêts.
La notion de « devoir de mise en garde » est néanmoins encadrée par des conditions, ce que la Cour de cassation n’a pas manqué de rappeler dans sa décision du 12 juillet 2023 (Pourvoi n° 22-11.321).
En l’espèce, une banque avait consenti à des emprunteurs un prêt en vue de financer d’une part l’acquisition d’un bien immobilier, et rembourser plusieurs emprunts en cours d’autre part.
Les débiteurs ont cru devoir invoquer devant les juges du fond le non-respect par le prêteur de son obligation de mise en garde, sollicitant par la même l’indemnisation de leur prétendu préjudice.
Par décisions spécialement motivées, les Juridictions du fond avaient pu estimer, en premier lieu, que le prêt accordé aux débiteurs n’était pas excessif, l’arrêt précise d’ailleurs sur ce point que « le crédit consenti n'était pas excessif puisque les restes à vivre, hors charges, étaient respectivement pendant la période relais de 3 785,62 euros et pendant la période d'amortissement d'une somme d'environ 3 500 euros par mois et en tout état de cause supérieur à 3 000 euros y compris pendant les années où les cotisations d'assurance étaient les plus élevées ».
En second lieu, il était relevé que le prêt nouvellement accordé aux débiteurs améliorait leur situation, au regard du fait qu’il permettait de solder des crédits précédents tout en finançant l’achat d’un nouveau bien. Il résultait que les charges des débiteurs s’en trouvaient réduites, sous réserve toutefois, que la vente d’un autre bien intervienne dans un délai conventionnellement convenu.
Dans ce contexte, c’est à juste titre que la Cour de cassation a rejeté le pouvoir formé par les débiteurs, motivant ainsi sa décision : « La cour d'appel, qui a souverainement estimé que les emprunteurs disposaient d'un "reste à vivre" suffisant pour s'acquitter des mensualités du crédit et que celui-ci ne créait pas d'endettement nouveau à l'issue de la période relais, en a exactement déduit, sans avoir à procéder à la recherche relative au taux d'endettement que ses constatations rendaient inopérante, et indépendamment du motif surabondant relatif au caractère averti des emprunteurs, que le prêteur n'était pas tenu à une obligation de mise en garde ».
En effet, le devoir de mise en garde impose qu’une faute soit commise par le prêteur : ne pas rechercher si les capacités financières de l’emprunteur lui permettent de faire face au crédit proposé et à tout le moins, évaluer les risques d’endettement engendrés.
Par Maître Cédric MIGNARD